vendredi 17 mai 2024

Coupable et victime: à la poursuite de la mystérieuse Alex

Pierre Lemaitre – Il y a quelque chose de virtuose dans le thriller "Alex" de Pierre Lemaitre. Celui-ci s'inscrit dans une trilogie romanesque mettant en scène le policier Camille Verhoeven, déjà vu dans "Travail soigné": ça résonne au fil des pages d'"Alex".

Quelques mots d'abord au sujet de l'impression que laisse le personnage éponyme, c'est-à-dire la fameuse Alex: l'auteur réussit à la faire passer pour une victime dans un premier temps. Puis, au fil des pages, le lecteur s'aperçoit que c'est en fait une criminelle, victime aussi de son enfance, et que les scènes terribles du début du roman ne sont qu'un accident de parcours. Baladé entre une première impression positive et les actes glaçants dont Alex est capable pour se venger d'une enfance volée, le lecteur ne peut être qu'ému par un tel personnage, ambigu, froidement déterminé, à la fois coupable et victime, semblant frapper au hasard.

Camille Verhoeven? Les fidèles de la première heure de Pierre Lemaitre l'auront déjà vu lorsqu'ils ouvrent "Alex". Le personnage ne manque pas de sel: il mesure un mètre quarante-cinq tout mouillé, ce qui permet à l'auteur de développer quelques scènes cocasses où ceux qui lui font des remarques sur sa taille s'enfoncent lamentablement. De plus, ce garçon s'avère habile avec un crayon en main, ce qui apparaît comme un atavisme: sa mère était une artiste qui fume. L'équipe de police dessinée par l'écrivain ne manque pas de pittoresque: on pense en particulier à Armand, un garçon au tempérament de kleptomane, prompt à taper une cigarette çà et là, voire plus, ou à Louis, riche à millions.

"Alex" apparaît comme un jeu de masques, à la fois ressemblants et dissemblants au gré des portraits-robots qui collent presque. On découvre en effet qu'Alex est adepte des perruques et des verres de contact, et qu'elle change d'identité à chaque homme qu'elle rencontre. Inconnue des services de police, elle s'avère littéralement insaisissable: l'auteur fait en sorte que rien ne puisse rapprocher les indices recueillis d'une personne précise. Et c'est avec jouissance que le lecteur voit l'enquête patiner et imagine le cerveau des enquêteurs chauffer: "C'est bien la même personne, mais c'est qui?". Cela, d'autant plus qu'en parallèle, il a la réponse...

Terrible créature donc que celle d'Alex, victime d'un passé glaçant, qui n'oublie ni ne pardonne rien... Le lecteur connaît les enquêteurs, la victime, la coupable... dès lors, au fil des pages, c'est le mobile qu'il s'agit d'identifier – dans un souci plus large de répondre à la question rituelle: "Comment en est-on arrivé là?". L'écrivain dessine, en point d'orgue de son roman, un interrogatoire magistral vu comme un duel entre deux personnages clés. Trouveront-ils la vérité, assureront-ils la justice? En refermant "Alex", le lecteur se trouve seul juge.

Pierre Lemaitre, Alex, Paris, Le Livre de Poche, 2012/Albin Michel, 2011.



mardi 14 mai 2024

L'épouse face à l'amante, l'écrivaine face à la traductrice: Mélanie Chappuis au théâtre

Mélanie Chappuis – Elles sont deux sur scène, l'épouse et l'amante. Dix ans d'âge les séparent, un homme les rapproche et les éloigne à la fois. C'est le propos de la pièce de théâtre "L'autre" de Mélanie Chappuis, jouée jusqu'au 23 mai 2024 au Théâtricul de Chênes-Bougeries, près de Genève. C'est par le biais de son texte que j'ai découvert cette pièce, c'est donc un retour de lecture que je ferai ici. Qu'on sache cependant que sur scène pour cette création, Mélanie Chappuis donne la réplique à Maria Mettral, dans une mise en scène signée Christian Gregori.

On le comprend vite, Alessandra l'épouse et Nelly l'amante ne passeront pas leurs vacances ensemble. Mais y a-t-il une manière de sortir par le haut d'une relation forcément conflictuelle entre deux femmes qui se partagent le même homme? Et l'amour, dans tout ça? En mettant en scène deux femmes d'âge mûr, la dramaturge évite l'écueil du motif convenu de l'homme qui, à l'heure du démon de midi, recherche une jeunette. Elle le fait même disparaître avec vigueur en évoquant, dans le dialogue qui s'installe entre Nelly et Alessandra, "Le Fusil de chasse", roman de Yasushi Inoué (non cité, c'est dommage...), où l'amante est plus âgée que l'épouse. Et où chacune finit libre. Ou morte, ce qui revient peut-être au même.

Le motif du sentiment amoureux traverse bien sûr "L'Autre", offrant une réflexion sur ce que ressentent des époux après de nombreuses années de vie commune. L'amour peut dès lors apparaître, au fil des répliques, comme un autre nom de la soumission à un mari suffisamment puissant pour gérer même la notoriété de sa femme – du moins du point de vue de celle-ci, la voix du mari étant la grande absente de cette pièce de théâtre: on parle de lui comme d'une Arlésienne. 

Entre Nelly la traductrice et Alessandra l'écrivaine, pourtant, il est des voies qui rapprochent. Au fil des répliques, l'écrivaine met en scène à travers ses deux personnages ce que peuvent se reprocher les deux rôles, sans qu'aucun ne domine. Cela dit, en mettant face à face une traductrice qui finit par tutoyer comme une manière de familiarité proposée à une écrivaine qui, jusqu'à la dernière réplique, en reste à un vouvoiement déférent et supérieur, la dramaturge suggère que celle qui vouvoie, l'écrivaine donc, domine, ne serait-ce qu'en rejetant le tutoiement proposé par une traductrice vue comme la servante d'un texte littéraire écrit, donc pensé, par quelqu'un d'autre, et nécessairement traître (il est question de Judas en début de pièce, et de toutes façons, euh, hein: "traduttore, tradittore!", selon un cliché répandu sur la profession des traducteurs).

Si elle se termine sur une promesse d'émancipation teintée de quelques références littéraires (Thérèse Desqueyroux ou Thérèse Raquin, par exemple, et l'auteure les fait se télescoper en fin d'ouvrage), cette pièce empreinte de références littéraires met en scène deux personnages aux répliques finement affûtées, entre attirance et rejet: tout commence dans un esprit conflictuel, à chacun des personnages ses banderilles! Le mot d'"arène" (p. 20), immanquablement évocateur de l'imaginaire de la tauromachie, apparaît d'ailleurs dans les didascalies pour souligner l'idée constante  d'un conflit rituel.

Mais l'issue de "L'Autre" est-elle un acte de paix, par-delà une complicité espérée au travers de telle ou telle réplique sympa synonyme de main tendue? Ce ne sera pas inconditionnel: lâché par Alessandra l'écrivaine, la dernière réplique, "Ecrivez-moi", invite Nelly la traductrice à faire l'effort de venir sur son terrain. Duel entre épouse et amante, "L'autre" peut aussi dès lors être vu comme le récit du rapport de force qui ne manque pas de fonctionner entre une traductrice littéraire et une écrivaine: à qui revient la plus grande part de liberté?

Mélanie Chappuis, L'Autre, Lausanne, BSN Press, 2024.

Le site des éditions BSN Press.


lundi 13 mai 2024

Amin Maalouf, quand l'identité peut tuer

Amin Maalouf – À l'heure où toutes les identités se revendiquent comme telles à grands coups de drapeaux et de manifestations dans l'espace public, il est intéressant de se plonger dans le court essai "Les Identités meurtrières" d'Amin Maalouf. Peut-on tuer au nom d'une identité? La réponse est malheureusement positive aujourd'hui encore... et l'auteur rappelle que la question n'a rien de neuf.

Pédagogue, l'auteur renonce à toute forme de jargon pour évoquer sa thématique. Il préfère partir de sa propre expérience d'écrivain à la fois français et libanais (l'ordre est indifférent) et commence par évoquer à quel point il n'apprécie plus d'être contraint de se décrire comme d'une seule identité, de n'être réduit qu'à une appartenance.

Au contraire, il s'assume riche de la multiplicité de celles-ci, qui le rendent unique alors que, prise individuellement, chaque identité le rapproche d'une partie plus ou moins grande de l'humanité. Humaniste, sa réflexion s'avère dès lors tendue entre l'individuel et l'universel. 

Deux exemples, tirés du vécu de l'auteur, marquent cet ouvrage: les identités religieuses, en particulier chrétienne et musulmane, et l'identité linguistique. La perspective est ici volontiers historique: l'auteur décrit l'évolution d'un christianisme qui se libère de la tutelle de Dieu alors que l'Islam, originellement ouvert à un certain libéralisme, s'est peu à peu refermé sur lui-même. Par la faute du christianisme dominant au cours des siècles? L'auteur l'avance. 

Côté rapport à la langue, l'auteur préconise que chaque personne en Europe en maîtrise trois, chacune ayant un statut particulier dans son cœur et son esprit. La langue maternelle est un point de départ incontournable, l'anglais apparaîtrait comme la troisième langue, utilitaire, et il y aurait la place pour une deuxième langue, première langue étrangère, qui serait une "langue d'adoption", choisie avec enthousiasme. 

Cela, en indiquant que l'histoire a voulu que l'Occident a, à un certain moment de l'histoire, été en mesure de rayonner sur le monde entier et de le dominer. Ce règne arrive-t-il à son terme? Nous sommes à un tournant, mais "Les Identités meurtrières", paru à la fin du vingtième siècle, ne pose pas cette question et, en particulier, admet le caractère indispensable de la langue anglaise dans le bagage de tout humain, même sous une forme sommaire. Ce faisant, bien de son temps, il acte la domination d'un certain libéralisme occidental, alors victorieux du communisme, mais remise aujourd'hui en question.

De même, l'auteur ne remet pas en cause la mondialisation, et c'est aussi pour cela qu'il préconise de s'armer pour celle-ci. Mais dans le monde multipolaire qui vient, où des puissances de civilisation autres que l'Occident émergent et veulent avoir droit au chapitre, le terme de "mondialisation" a-t-il encore le même sens qu'il y a une petite trentaine d'années? 

"Les Identités meurtrières" apparaît comme un livre important et bien pensé, soucieux de ne pas abrutir le lecteur avec des mots impossibles. Mais il mériterait quelques compléments et nuances aujourd'hui, à plus d'une génération de distance, en évoquant par exemple les personnes qui se collent elles-mêmes ou imposent aux autres de toutes nouvelles identités, notamment de "genre", comme des étiquettes. Désormais Immortel, portant l'habit vert avec une classe indéniable, l'auteur y pense-t-il? Ce serait une idée.

Amin Maalouf, Les Identités meurtrières, Paris, Le Livre de Poche, 2006/Grasset et Fasquelle, 1998. 

Le site des éditions Grasset, celui du Livre de Poche.

dimanche 12 mai 2024

Dimanche poétique 639: Vénus Khoury-Ghata

La mouette morte sur ton paillasson vient de ton sommeil
la mer va déferler jusqu'à ton seuil pour l'enterrer dans l'eau
recroquevillée sur elle-même
tu prends la même posture que l'oiseau
deviens mouette sur une grève déserte
le reste de la planète submergé par l'eau

Vénus Khoury-Ghata (1937- ), Désarroi des âmes errantes, Paris, Mercure de France, 2024.

mercredi 8 mai 2024

Errance des âmes, vives ou mortes

Vénus Khoury-Ghata – Lointaines, comme éthérées, ou incroyablement concrètes, avec la mort pour leitmotiv: telles sont les âmes que la poétesse Vénus Khoury-Ghata décrit dans son recueil "Désarroi des âmes errantes". Les poèmes qui le composent sont le plus souvent brefs, et fulgurants si l'on songe à ce dont ils parlent tour à tour; l'économie de ponctuation leur confère cependant une longueur en bouche, une résonance indéniable. 

Il est donc question des éléments naturels, des âmes en peine, mais aussi du poète face à la feuille blanche,  en résonance avec le blanc de la neige, mais aussi avec des motifs tirés de la nature tels que les oiseaux morts. Et s'invitent les mânes de poétesses et écrivaines qui se sont donné la mort, Sylvia Plath, Virginia Woolf, Marina Tsvetaïeva – et leur confrontation aux éléments fatals.

Et l'auteure évoque les mères, celles d'autrefois dites au temps passé (séquence "Les mères"). Peu à peu s'installe le thème récurrent du sang, fort, que ce soit celui du coq tué pour le repas du dimanche ou celui des règles – un sang qui entre en résonance avec le rouge des poivrons, évoqué dans l'un des poèmes de ce bout de recueil.

Attentif aux couleurs porteuses de force et d'imaginaire, écrit dans les nuances musicales du mode mineur, "Désarroi des âmes errantes" balade son lecteur entre une poignée de thèmes universels, avec une attention marquée pour la vie et la condition féminine, et aussi pour la mort, qui frappera chacune et chacun. Cela, sur un ton simple et sans détours, franc et direct.

Vénus Khoury-Ghata, Désarroi des âmes errantes, Paris, Mercure de France, 2024.

Le site des éditions Mercure de France.


lundi 6 mai 2024

La musique des mots pour dire la vie de l'ordinaire Gary

Pascal Cuvelier – "Gary contre l'instant impossible", c'est avant tout une musique, une manière de déclamer le texte, quitte à ce que ça passe pour un procédé: le prénom de Gary apparaît régulièrement comme sujet de phrases courtes qui font haleter le récit, certaines se passant même de verbe. Fondée sur la répétition et le ressassement, la musique accroche, envoûte, questionne, on a à la fois envie de s'y immerger sans fin et de s'en défaire sans délai.

Qui est Gary? Difficile de le dire, singulièrement, lorsqu'on a refermé "Gary contre l'instant impossible": l'auteur a réussi à camper avec lui un quidam parfaitement anonyme. Tout au plus saura-t-on qu'il est en surpoids notable (120 kilos, l'auteur le redit à plus d'une reprise – le ressassement, toujours...), qu'il est commercial pour un fabricant de meubles à Mende (Lozère), qu'il a eu une enfance et qu'il vit toutes sortes d'aventures, mû par un énigmatique rayon vert. Ah – et, pour renouer avec l'ordinaire en fin de roman, qu'il est en procédure de divorce.

Les aventures que l'auteur réserve à son personnage commencent par des actions quasi ordinaires (partir à Marseille en voiture sur un coup de tête, quitter un emploi, écouter des ragots) et se poursuivent avec des événements qui tiennent de l'étrange, à l'instar de cet épisode ménagé dans un dédale sans fin, à la Jorge Luis Borges, au-dessous d'un grand magasin, auquel Gary accède en faisant un trou dans le sol pour échapper à un autre danger. Gary sera même jugé par des extraterrestres, au terme d'une intrigue qui aime surenchérir.

Enfin, le double thème du travail en entreprise et de son sens traverse ce roman, qui assume une certaine vision sociale dès le départ, avec ce Gary qui ne trouve pas le moyen de placer ses bonnes idées, des idées qui, depuis la publication du roman (2016), sont pour certaines devenues des évidences: jeux sur téléphone portable, paiement des sacs en plastique dans les supermarchés dans un souci d'écologie. Cela se poursuit dans le monde du meuble, où l'entreprise est un microcosme, tout comme la petite ville de Mende où elle basée: ici ou là, tout le monde se connaît et a une histoire à raconter sur son voisin.

"Gary contre l'instant impossible", ce sont d'infinis méandres qui sont ceux de la vie d'un bonhomme, ce personnage intrigant de Gary Coupet, pas forcément si éloignés de ceux de l'existence de chacune et chacun d'entre nous. On le découvre enfin, ce Gary, formé par sa jeunesse bien cadrée et ritualisée, peu propice à faire vivre une vocation artistique qui, pourtant, tendait les bras à ce bonhomme qui, tout gosse, tenait à chanter dix chants lors des repas du dimanche en famille élargie. Entre récit de l'ordinaire et audaces vers l'extraordinaire, voilà un petit roman bien surprenant.

Pascal Cuvelier, Gary contre l'instant impossible, Saint-Etienne, Abribus, 2016. 

Tiré à 32 exemplaires, avis aux amateurs de livres rares!

Le blog des éditions Abribus.


dimanche 5 mai 2024

Du rififi du côté de la gauche pastèque

Pierre Ronpipal – "Le vert était rouge à l'intérieur" est le quatorzième titre de la série "Damned", consacrée au pastiche des romans populaires à l'américaine, à lire entre deux gares lorsqu'on voyage en train. Signé Pierre Ronpipal, ce petit livre s'intéresse au destin de quelques écologistes pas tellement d'accord entre eux.

Au cœur de l'intrigue, se trouve un certain Palpiron, dont le nom s'avère un jeu de mots sur le nom de l'auteur, qui est lui-même le pseudonyme d'un journaliste romand. Après un passé vécu dans les mouvements de gauche violente qui ont marqué l'histoire italienne des années 1970 (ah, les années de plomb!), le bonhomme aspire à une vieillesse tranquille, comme le fut celle de son grand-père, et sur son fief – marqué par une biodiversité exemplaire. 

Or, Antoine Meule, membre du conseil municipal du village où vit, Bourlens, est de ceux qui souhaitent l'exproprier pour créer un écoquartier. Et tout commence par une prise d'otage... A cette vision urbaine et politique de l'écologie, capable d'accepter les processus démocratiques à condition qu'ils servent ses intérêts, s'oppose la vision radicale de l'écologie que porte Jessica, compagne du maire, activiste qui passe beaucoup de temps en réunions avec tel ou tel groupuscule.

Voilà, en 75 pages, un roman efficace qui met habilement à nu, dans une logique de confrontation, les conflits qui traversent le courant écologique d'aujourd'hui. Cela, à un niveau villageois concret, à portée d'action des individus qui hantent "Le vert était rouge à l'intérieur".

Et pour porter son intrigue au noir, l'écrivain met en scène quelques personnages secondaires bien vachards. On pense à l'ami Simon, prompt à tuer et capable de maquiller un crime parfait. Et bien évidemment au jeu de poker menteur du promoteur immobilier, qui oppose le gros fric aux convictions du père Palpiron (il a une fille...), dont la conception du respect de l'environnement est marquée par le bon sens et la sagesse du passé.

Alors oui, c'est efficace, c'est un roman noir qui s'habille de vert pour mettre en scène un vieux rouge qui veut tranquillement boire son jaune à l'ombre d'un hêtre. Derrière une intrigue solide, l'écrivain recrée, amusé et impeccable, les contradictions du discours écologiste d'aujourd'hui, qu'il soit politique ou non. Vous avez dit gauche pastèque? Nous y voilà...

Pierre Ronpipal, Le vert était rouge à l'intérieur, Lausanne, Nouvelles Editions Humus, 2024.

Le site des Nouvelles Editions Humus.